Concert d’éloges pour un guerrier fatigué

(Washington) Chaque joueur du Canadien l’a chaudement étreint au son de la sirène finale. À peu près tous les joueurs des Capitals de Washington lui ont aussi donné une accolade. Les arbitres lui ont serré la main. Même Spencer Carbery, entraîneur-chef des Caps, a amorcé son point de presse en lui rendant hommage. David Savard n’a certainement pas conclu sa carrière de la façon qu’il aurait souhaitée. Mais la manière dont parlent de lui tous ceux qui l’ont croisé, que ce soit comme coéquipiers ou comme adversaires, témoigne du respect infini que le Québécois a inspiré. Savard, en effet, a annoncé avant le début des séries éliminatoires qu’il disputait les derniers matchs de sa carrière. À 34 ans, après 870 matchs de saison et 62 autres de séries, les os broyés par des milliers de rondelles bloquées et de mises en échec assénées ou encaissées, le guerrier fatigué prendra sa retraite. PHOTO NICK WASS, ASSOCIATED PRESS Brendan Gallagher fait un câlin à David Savard après le match de mercredi. Les yeux dans l’eau, il a été félicité par chaque personne sur la glace quand ç’a été fini. Dans les entrailles du Capital One Arena, il a décliné l’invitation de s’adresser aux journalistes à chaud. On l’a toutefois croisé, bière à la main, discutant avec Pierre-Luc Dubois, protégé devenu ami lors des premiers pas de ce dernier avec les Blue Jackets de Columbus en 2017. La boucle s’est bouclée, en quelque sorte : Dubois a commencé sa carrière avec Savard, qui a conclu la sienne contre Dubois. « C’est comme un frère pour moi, a dit l’attaquant aux reporters dans le vestiaire des Capitals. Il est davantage qu’un ami. Sa femme et ses enfants sont devenus ma famille. […] Je suis extrêmement fier de ce qu’il a réalisé dans sa carrière. Je suis vraiment heureux d’être avec lui pour ce dernier match-là. » Les marques de respect étaient partout, disions-nous. Pendant les traditionnelles poignées de main au centre de la patinoire après que l’élimination du CH eut été confirmée, Alexander Ovechkin a pris un moment pour parler avec Savard. PHOTO NICK WASS, ASSOCIATED PRESS Alexander Ovechkin a pris un moment pour parler avec David Savard à la fin du match. « Je lui ai dit : peut-être une autre année ?, a raconté le Russe en fin de soirée. Il a connu une grande carrière, il a gagné la Coupe Stanley… C’est un excellent joueur. » Voir un gars comme Ovi lui donner un câlin et parler avec lui, je pense que c’est très éloquent. C’est un excellent joueur qui respecte un excellent défenseur. Jake Evans Spencer Carbery s’est d’ailleurs étonné de voir Savard se jeter encore et encore devant les tirs du numéro 8. « Je ne pourrais même pas dire combien, s’est ému l’entraîneur. Il a tout laissé sur la glace. Ç’a été un honneur de compétitionner contre lui. » Exemple Dans le camp montréalais, Martin St-Louis a aussi parlé de l’« honneur » qui lui a été fait « de diriger cet homme-là ». « Nos jeunes ne seraient jamais là où ils sont sans un David Savard, a repris le pilote. C’est un professionnel qui montre l’exemple à tous les jeunes qui grandissent dans notre culture. » Dans le vestiaire du Canadien, l’émotion était palpable. Il laisse une empreinte sur tout le monde dans cette pièce. Je me suis toujours fié sur lui et je suis allé le voir quand j’avais besoin d’aide. C’est un gars de première classe. J’aurais aimé qu’on étire sa saison et sa carrière un peu plus. Nick Suzuki « Je suis reconnaissant d’avoir joué avec lui, a abondé Brendan Gallagher. Il nous a rendus meilleurs, il nous a montré ce que c’est que d’être un professionnel. Il a fait de ce vestiaire un endroit où il fait bon vivre. Il doit être fier de tout ce qu’il a accompli. J’espère qu’au cours des prochains jours, il aura l’occasion de le réaliser. » « Il a donné son cœur et son âme pour nous, a ajouté Jake Evans. C’est le genre de truc qui fait le tour de la ligue. Les gens respectent les joueurs qui se rendent dans les zones difficiles, qui bloquent des tirs et qui sont aussi durs à affronter. » « Tu n’en croises pas souvent des comme ça, des gars qui, chaque match, mettent toujours l’équipe devant eux, a conclu Alexandre Carrier. Je sais qu’il a dit que son corps commençait à lâcher, mais toute l’année, il a continué à pousser pour aider l’équipe à connaître du succès. » Tourner la page sur une telle carrière sera sans doute difficile pour David Savard. Le concert d’éloges entendu mercredi soir confirme toutefois qu’il peut se retirer la tête haute. La tête en paix, aussi. Il laisse derrière lui une maison en ordre, et d’autres vétérans prendront sa relève, a prédit Martin St-Louis. Après 14 ans dans la LNH, au cours desquelles il a notamment bloqué un total de 1765 tirs, le guerrier peut se reposer.