Critique Thunderbolts* : le film Marvel qui redonne envie de voir les prochains ?

Pour vous situer l’état du MCU avant Thunderbolts*, on vous partage une petite anecdote de rédaction. Bien que nous soyons nombreux ici à nous pencher sur les films Marvel, il fut un temps où nous nous battions pour avoir le plaisir de les couvrir. Une époque révolue puisque les dernières productions ont eu davantage l’effet de nous faire nous déplacer en salles la boule au ventre, avec la crainte d’un nouvel Ant-Man & la Guêpe : Quantumania ou Thor : Love & Thunder. On peut même dire que les deux seules bonnes surprises récentes l’ont été, car assez déconnectés du reste de l’entreprise. Deadpool & Wolverine fonctionnait sur notre nostalgie avec humour et Les Gardiens de la Galaxie 3 était la lettre d’adieu d’un père à ses enfants. Alors quand Captain America : Brave New World est venu enfoncer un nouveau gros clou dans le cercueil de la médiocrité, on pensait le MCU mort et enterré. Un avis que nous n’avons pas l’impression d’être les seuls à partager, car si la venue des 4 Fantastiques attire une certaine curiosité autour d’une direction artistique inédite, le Thunderbolts* de Jake Schreier ne paraît pas soulever les foules. On ne compte plus les « vas-y d’abord, tu me diras si ça vaut le coup ensuite » entendus autour de nous, comme s’il fallait désormais d’abord pousser quelqu’un dans l’eau afin de juger si elle n’est pas trop froide pour y entrer. Eh bien soit ! On a plongé et voilà ce qu’il en ressort. Piégés par leur employeur, Valentina Allegra de Fontaine (Julia Louis-Dreyfus), un groupe de laissés-pour-compte va tenter de se faire confiance et de collaborer pour empêcher une menace bien plus grande qu’eux. Yelena Belova (Florence Pugh), Bucky Barnes (Sebastian Stan), Ghost (Hannah John-Kamen), John Walker (Wyatt Russell), Taskmaster (Olga Kurylenko), Red Guardian (David Harbour) et Bob (Lewis Pullman) vont devoir surmonter leurs propres échecs s’ils veulent enfin devenir les héros qu’ils auraient rêvé d’être. L’art du recyclage ? On se souvient que trop bien d’un Brave New World nous présentant finalement le monde d’avant, notamment en nous ressortant une histoire vieille de 2008. Et le retour de Robert Downey Jr. au sein de l’écurie sonne le glas. Cela donne un aperçu de ce qu’est devenu le MCU, à savoir une entreprise tournant en rond qui ne sait plus ni comment apporter de la nouveauté, ni comment retrouver la recette miracle. Il y a une sorte de note d’intention dans la sortie de Thunderbolts* où on pousse sur le devant de la scène des personnages oubliables (John Walker de la série Falcon and the Winter Soldier) ou complètement oubliés (Ghost de Ant-Man et la Guêpe) hérités du MCU. Encore et toujours ce regard dans le rétroviseur. Manœuvre désespérée ? Non non, on nous jure que cela fait partie d’un plan savamment construit depuis des années. La première surprise de ce Thunderbolts*, c’est que ce retour en arrière fonctionne. Et c’est peut-être justement parce que ces protagonistes font partie des « déchets » que le studio a laissé derrière lui. Sam Wilson doit composer avec le poids d’un Captain America qui l’a précédé. Ici, le groupe sait que personne ne compte sur lui, car il ne compte même pas sur lui-même non plus. Des rebuts de la société sans héritage dont le destin ne peut s’inscrire finalement qu’au futur. Le long-métrage peut alors renouer avec le charme de ses prédécesseurs sans la pression imposée par ces derniers. Dit simplement, on retrouve ce style divertissant mélangeant action, humour et émotion, et qui équilibre suffisamment bien les trois pour qu’ils se sabotent pas. Évidemment, cela signifie également que les faiblesses associées sont comprises dans le lot avec une écriture pas subtile pour un sou dès qu’il s’agit de faire référence aux copains. Normalement, si vous buvez un verre à chaque fois que les Avengers sont cités, vous êtes en coma éthylique à la moitié de l’histoire. L’importance des personnages est asymétrique au possible — voire inexistante pour certain.es — et l’humour forcé du Red Guardian peut rapidement lasser. Néanmoins, même ces défauts nous donnent l’impression d’être de retour à la maison, y compris dans l’intérêt des scènes post-génériques. Thunderbolts*, un Marvel électrique ? Si le cahier des charges Marvel est bien présent, il laisse la latitude à Thunderbolts* pour s’exprimer. Et on peut compter sur l’équipe créative, principalement composée d’anciens de la série Acharnés (sur Netflix, regardez-la !), pour y mettre son grain de sel. Loin d’être léger tout du long, le récit va au contraire ouvertement aborder des thèmes forts comme la santé mentale, la dépression, la solitude, le besoin d’appartenance… Le long-métrage interroge nos héros sur leur définition même de l’héroïsme et ce que cela représente à leurs yeux. La psyché est au cœur de l’intrigue et elle est traitée le plus sérieusement du monde, chose qui avait disparu depuis le décrié (et pourtant excellent) Iron Man 3. Les super-pouvoirs ne sont pas la solution, ils sont un outil entre les mains d’individus faillibles comme tout le monde. Et dans ce domaine, cela aide d’avoir un casting impliqué. On se plaint souvent de quelques acteurs venus chez Marvel pour toucher le chèque au fil du temps. Or, ce n’est jamais un sentiment que l’on ressent ici et on ajoute que c’est un vrai régal de voir Julia Louis-Dreyfus retrouver son rôle de Veep. D’autant que son personnage apporte avec lui un propos très acide sur la politique américaine et sa capacité cynique à toujours retourner le jeu à son avantage, tel le méchant ultime qu’aucun super-pouvoir ne peut vaincre. Il faut aussi mettre au crédit de Jake Scheier d’avoir soigné ses scènes d’action avec notamment deux gros morceaux qui mettent les chorégraphes à l’honneur. Les capacités de chacun sont mises en avant, de la virevoltante Yelena au plus rentre-dedans Bucky. Les séquences sont visibles, rythmées, efficaces, au point de nous donner un goût de trop peu en bouche, comme lors d’un combat où on peut voir un certain personnage en action. Oui, pour la première fois depuis longtemps, on est devant un film Marvel qui nous donne envie de voir les prochains.