Meurtre d’Aboubakar Cissé : Une « géométrie variable » pour les minutes de silence à l’Assemblée ? Prudence
Une simple minute de silence a suffi pour entraîner un déferlement de fausses informations sur X. Refusée dans un premier temps par Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale (AN) est finalement revenue sur sa décision et l’hommage à Aboubakar Cissé s’est bien tenu dans l’après-midi du mardi 29 avril. Depuis le meurtre de ce jeune Malien de 22 ans, survenu le vendredi 25 avril dans une mosquée de la petite ville de La Grand-Combe dans le Gard, les polémiques se multiplient et une formule revient à toutes les sauces : le deux poids, deux mesures. Mardi 29 avril, l’emploi de cette formule a atteint son paroxysme. Sur les réseaux sociaux, ce sont d’abord des partisans de gauche qui ont critiqué le refus de la minute de silence arguant que pour d’autres cas, prétendument similaires, elle aurait été observée. Enfin, une fois la minute de silence officialisée, ce sont des internautes de droite, surtout d’extrême droite, qui ont joué la carte du deux poids, deux mesures là aussi en affirmant, souvent à tort, que d’autres personnes n’ont pas eu le droit à cet hommage preuve d’une « hiérarchisation » des victimes. Dans la majorité des cas, ces comparaisons sont fausses. Non, aucune minute de silence n’a été observée à l’Assemblée pour Mireille Knoll Alors que la minute de silence venait juste d’être refusée, les partisans et élus de gauche, principalement de la France Insoumise, ont été nombreux à faire part de leur indignation comme ici, là ou encore ici. Parmi eux, certains n’ont pas hésité à faire des parallèles à des drames similaires qui auraient, selon eux, bénéficié d’une minute de silence, preuve d’une incohérence dans les attributions de ces hommages. C’est le cas d’une députée LFI qui expliquait dans un tweet, supprimé depuis, que « tout comme Mireille Knoll, victime d’un meurtre antisémite, le meurtre islamophobe d’Aboubakar Cissé doit donner lieu à une minute de silence à l’Assemblée ». Un argument qui revient sur d’autres posts, parfois encore visibles, comme celui-ci. En réalité aucune minute de silence n’a été observée à l’AN pour Mireille Knoll, juive de 85 ans tuée dans son appartement en 2018. En revanche, la séance prévue à l’AN le jour de la marche blanche en son hommage avait été levée à 17h30 pour permettre aux députés qui le souhaitaient de s’y rendre. S’il faut souligner que la plupart des élus ayant fait cette comparaison ont supprimé leur publication, signe qu’ils ont remarqué s’être trompés, aucun mea culpa n’a été publié. Nahël et Aboubakar ont le droit à une minute de silence à l’Assemblée Nationale. Lola, Philippine, Thomas, Matisse sont de fait des victimes inférieures. Mais pourquoi donc Yael Braun-Pivet ? https://t.co/doE3UbndbJ — Bruno Attal (@Bruno_Attal_) April 29, 2025 L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires. Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies J’accepte Thomas, Philippine et les victimes de l’attentat de la basilique de Nice ont bien eu une minute de silence De l’autre côté de l’échiquier politique (surtout chez l’extrême droite), le phénomène a pris encore plus d’ampleur avec un nombre incalculable de posts mensongers. Cette fois, c’est le raisonnement inverse qui est fait. Des publications affirment, à tort dans la majorité des cas, que certains cas « similaires » n’ont pas eu le droit à une minute de silence à l’AN signe « d’hommages à géométrie variable ». Les noms de Thomas, adolescent tué à l’arme blanche lors d’un bal à Crépol (Drôme) en 2023, et de Philippine, étudiante tuée par un homme visé par une OQTF, sont souvent cités en exemple comme ici ou là. Pourtant, contrairement à ces affirmations, des minutes de silence ont bien été observées pour leur rendre hommage (séance du 28 novembre 2023 pour Thomas et séance du 1er octobre 2024 pour Philippine). Les comptes qui partagent ses fausses informations sont notamment proches du parti d’extrême droite Reconquête. C’est le cas de Guillaume Benssoussan, ancien candidat aux législatives, qui s’est déjà illustré à la mi-avril sur une autre affaire (à retrouver ici). Dans le même genre, les publications qui affirment que les victimes de l’attentat de la basilique de Nice en 2020 n’ont pas eu le droit à une minute de silence sont aussi mensongères (séance du 29 octobre 2020). Ce n’est pas la première fois que les minutes de silence observées à l’Assemblée nationale font polémique mais rarement un hommage rendu par le Palais Bourbon n’avait créé une vague de désinformation de cette ampleur.