Fahd Haïdar a fermé son agence immobilière pour prendre les armes et défendre sa localité de Jaramana, au sud-est de Damas, visée mardi par une attaque de groupes islamistes alliés au pouvoir syrien. Un message non authentifié insultant l’islam et imputé à un Druze sur les réseaux sociaux a mis le feu aux poudres, et ce commerçant de 48 ans craint un retour au « chaos », cinq mois après la chute du clan al-Assad et la fin des 14 années de guerre civile dans laquelle la Syrie avait basculé en 2011. Dix-sept personnes, dont sept combattants druzes, ont été tuées entre lundi et mardi à Jaramana, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), lors d’affrontements à caractère confessionnel. Les violences se sont étendues mercredi à la localité proche de Sahnaya, à 15 km au sud-ouest de Damas, où 22 combattants ont été tués, selon les autorités et l’OSDH. Un accord avait pourtant été scellé à la hâte mardi soir entre des représentants du gouvernement syrien et les responsables druzes de Jaramana pour enrayer les violences. Peu après, des centaines d’hommes armés druzes, dont de jeunes garçons, se sont déployés dans les quartiers de cette localité qui ressemblait mercredi matin à une zone de guerre, selon un correspondant de l’AFP. Au milieu de barricades improvisées avec de la terre, les combattants druzes distribuent des munitions et des armes, tandis que toutes les entrées de cette banlieue de plus d’un million d’habitants sont fermées à la circulation, ont constaté des journalistes de l’AFP. Fahd Haïdar affirme craindre de voir le pays sombrer dans un « bourbier de discorde qui affectera tous les Syriens », appelant la nouvelle administration syrienne à « trouver des solutions radicales pour étendre son contrôle et mettre fin aux gangs incontrôlés ». À lire aussi Israël intervient dans les violences confessionnelles en Syrie « Atmosphère de guerre » Les autorités syriennes ont réaffirmé mercredi leur engagement à « protéger » toutes les composantes de la société, y compris la minorité druze. « Depuis deux jours, les habitants de Jaramana vivent dans une véritable atmosphère de guerre », témoigne Rabii Mondher, un membre de la société civile de cette localité. « Tout le monde a peur de la guerre […] du siège, d’un nouvel assaut et de nouveaux martyrs », affirme-t-il. Comme de nombreux habitants, il souhaite que la « situation s’apaise […], car nous n’avons pas d’autre choix que de vivre ensemble ». Mounir Baaker a perdu son neveu Riadh dans les affrontements. Les larmes aux yeux, il reçoit des messages de condoléances. « Jaramana n’est pas habituée à cette situation », déplore l’oncle, tenant une photo de son neveu, qui figurait parmi plusieurs jeunes Druzes ayant rejoint les forces des ministères de l’Intérieur et de la Défense après la chute d’al-Assad en décembre. Il écarte toute volonté de vengeance : « Nous ne répondons pas au sang par le sang. » Il ajoute toutefois : « On nous a appris à être tolérants, à ne pas riposter et à ne pas attaquer qui que ce soit. Mais si nous sommes attaqués, nous nous défendrons. »