C’est un bilan à la fois parfaitement prévisible et totalement stupéfiant. En cent jours, Donald Trump a anéanti l’exception économique américaine, déstabilisé ses institutions et considérablement affaibli sa monnaie, ses marchés, sa crédibilité financière, son attrait touristique et son soft power culturel. En cent jours, le 47e président des Etats-Unis a ébranlé l’Otan et défait l’alliance militaire et politique de son pays avec pratiquement tous ses alliés, l’UE, le Japon, le Mexique, la Corée, les pays scandinaves, le Vietnam, la Suisse, et le Canada. En cent jours, il s’est copieusement enrichi, lui et sa famille, grâce à des investissements opaques en cryptomonnaies et à des manœuvres boursières nébuleuses. Ce faisant, il a ruiné des pays entiers, souvent les plus pauvres, en leur coupant sans autre forme de procès aides, contrats ou accords de libre-échange. En cent jours, dans une quête de vengeance aussi puérile qu’effrénée, le président des Etats-Unis a mené une campagne d’intimidation contre des dizaines de médias, d’universités, de magistrats, de compagnies commerciales, de cabinets d’avocats, d’adversaires politiques et de leurs enfants. En cent jours, Trump a pris le parti de la Russie de Vladimir Poutine contre l’Ukraine de Volodymyr Zelensky. Il a menacé de lancer nombre de plans colonialistes contraires au droit international, de l’invasion du Panamá à l’exploitation des fonds marins, de l’annexion «par la force s’il le faut» du Groenland à l’expatriation des habitants de la bande de Gaza. En cent jours, et avec un plaisir manifeste, Trump a expulsé plus de 200 personnes (dont presque aucune n’a de casier judiciaire) vers un goulag salvadorien tout en débitant, avec une volubilité extrême, des inepties monstrueuses. Il a semé le chaos dans les agences d’intérêt public les plus prestigieuses au monde, limogeant des centaines de scientifiques, fonctionnaires et inspecteurs.